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11. Processus tumoraux : introduction et oncogenèse (Syllabus)

Introduction

L’homme est un organisme multicellulaire regroupant plus de 10 à la 14 (10 puissance 14) cellules organisées en tissus, en organes et en systèmes. Le développement et la croissance sont conditionnés par des processus complexes qui permettent le régulation de différents étapes de la vie d’une cellule : la prolifération, la différenciation, la senescence et la mort cellulaire programmée (l’apoptose).

Ces phénomènes sont également mis en jeu au cours du renouvellement des cellules à durée de vie limitée, de la régénération des cellules parenchymateuses détruites et de la cicatrisation des plaies et des lésions inflammatoires. La bonne régulation de ces processus est à l’origine de l’homéostasie tissulaire.

Des anomalies moléculaires, de cette régulation sont à l’origine de proliférations mal contrôlées de groupes de cellules dont l’accumulation aboutit à la formation d’une "tumeur", macroscopiquement observable ou palpable.

Actuellement, le terme de "tumeur" tend à être employé au sens de "néoplasme" ou de "néoplasie", c’est-à-dire "toute nouvelle formation tissulaire (plus ou moins volumineuse) ressemblant (plus ou moins) au tissu normal homologue (adulte ou embryonnaire) aux dépens duquel elle s’est développée, qui a tendance à persister et à s’accroître et qui échappe aux règles biologiques de la croissance et de la différenciation cellulaire".

Cette définition permet de rendre compte de plusieurs des caractères d’une tumeur :
- il s’agit de la prolifération qualitativement et quantitativement anormale des éléments cellulaires d’un tissu organisé
- il existe un accroissement excessif et incoordonné de la tumeur par rapport aux tissus voisins
- la prolifération tumorale se poursuit après arrêt du "stimulus" qui lui a donné naissance
- la prolifération tumorale est biologiquement autonome

Anciennement, ou actuellement dans la littérature anglo-saxonne, on désignait par "tumeur" (tumor) toute augmentation de volume localisée d’un organe ou d’une région du corps.

Cette augmentation pouvait correspondre à des processus pathologiques de nature différente : tumeur vraie, pseudotumeur inflammatoire, dysembryoplasies (hamartomes, choristomes), hyperplasies et hypertrophies.

Cette définition correspond maintenant à celle du terme "tuméfaction". Les tuméfactions qui ne sont pas des tumeurs vraies (néoplasie) sont des "pseudo-tumeurs".

Les pseudo-tumeurs inflammatoires sont des augmentations locales du volume d’un tissu ou d’un organe dues à une réaction inflammatoire, en général subaiguë ou chronique. Il peut s’agir, entre autres, d’une réaction à corps étranger, d’un bourgeon charnu inflammatoire ou d’une cicatrice hypertrophique (chéloïde).

En réponse à des stimuli hormonaux, certains organes peuvent être le siège d’une hyperplasie, d’une hypertrophie ou d’une dystrophie et, ainsi, avoir un aspect pseudo-tumoral.

Les troubles malformatifs peuvent également donner lieu à des phénomènes pseudo-tumoraux.

Le choristome (grec choristos : séparé; -ome : tumeur) résulte de la présence dans un tissu ou un organe de cellules qui en sont absentes normalement (hétérotopie). Il peut s’agir de cellules surrénaliennes sous la capsule rénale, d’un nodule pancréatique sous la muqueuse digestive, ou de tissu neuroglial en dehors de la cavité crânienne (ectopie neurogliale).

L’hamartome (grec hamartanein : manquer le but; -ome ; tumeur) est caractérisé par une quantité excessive ou une disposition anormale, dans un tissu ou un organe, de cellules qui y existent normalement (il ne s’agit donc pas d’une hétérotopie). Ainsi, un hamartome pulmonaire peut contenir des îlots de cartilage, des vaisseaux sanguins, des structures bronchiques et du tissu lymphoïde.

8-2- Tumeurs bénignes, tumeurs malignes

Certains critères distinguent classiquement les tumeurs "bénignes" des tumeurs "malignes".

Tableau I - Critères de distinction entre tumeurs bénignes et tumeurs malignes ?

Tumeurs bénignes Tumeurs malignes Bien limitée Mal limitée Encapsulée Non encapsulée Histologiquement semblable au tissu d’origine Plus ou moins semblable au tissu d’origine (dédifférenciation, différenciation aberrante) Cellules régulières Cellules irrégulières (cellules cancéreuses) Croissance lente Croissance rapide Refoulement sans destruction des tissus voisins Envahissement des tissus voisins Pas de récidive locale après exérèse complète Récidive possible après exérèse supposée totale Pas de métastase Métastase

Si cette distinction a une certaine réalité, elle doit cependant être nuancée. En effet:
- Certaines tumeurs bénignes, comme les fibromatoses ou le fibrome cutané de Darrier et Ferrand, sont mal limitées, sont localement invasives et récidivent fréquemment après exérèse.
- Il existe un continuum entre certaines tumeurs "bénignes" et des tumeurs "malignes" : adénomes coliques et adénocarcinomes coliques, tumeurs urothéliales papillaires, astrocytomes, tumeurs papillaires du rein. Ce passage se fait par un phénomène appelé "progression tumorale", qui correspond à l’acquisition progressive par la tumeur d’un phénotype de malignité et d’anomalies chromosomiques en nombre croissant.
- Certaines tumeurs malignes ont une évolution locale et ne donnent pas de métastase (exemples: carcinome basocellulaire cutané, gliome cérébral).
- Enfin, il peut arriver que les critères macroscopiques et microscopiques d’une tumeur ne permettent pas d’en affirmer la nature bénigne ou maligne (par exemple, dans le cas des tumeurs endocrines). Dans certains cas, cette nature maligne ne peut être affirmée que par la survenue de métastases (exemple, les tumeurs de la corticosurrénale).

8-3- Clonalité

Un clone est un ensemble de cellules dérivées d’une seule cellule initiale. Une tumeur se développant à partir d’un groupe de cellules est dite polyclonale. Une tumeur se développant à partir de quelques cellules est dite oligoclonale. Une tumeur se développant à partir d’une seule cellule est dite monoclonale.

Les tumeurs malignes sont monoclonales : la prolifération tumorale représente un même clone cellulaire. Bien que certaines tumeurs bénignes, ou même certaines lésions non tumorales, soient également monoclonales, la monoclonalité peut être un critère de malignité, en particulier dans les tumeurs lymphoïdes.

Pour montrer la clonalité d’une population lymphoïde B ou T, on étudie le remaniement du gène de chaîne lourde d’immunoglobulines ou du gène du récepteur T par Southern blot ou par amplification PCR.

Pour les autres tumeurs, le caractère monoclonal d’une population cellulaire peut être démontré par différentes techniques de biologie moléculaire (étude du profil d’inactivation du chromosome X chez la femme).

8-4-. Différenciation, dédifférenciation et anaplasie

Les cellules tumorales expriment le plus souvent des caractères phénotypiques rappelant des cellules normales de l’organisme. Ces caractères phénotypiques peuvent être morphologiques, immunohistochimiques ou enzymatiques.

Les tumeurs bien différenciées sont le plus souvent composées de cellules rappelant leur tissu d’origine. Les tumeurs peuvent au contraire exprimer un phénotype absent de leur organe d’origine (comme un ostéosarcome rénal, par exemple).

La différenciation peut être telle, qu’à fort grossissement, on ne peut distinguer une cellule normale d’une cellule tumorale (comme dans un léiomyome utérin, par exemple). En général, les tumeurs bénignes sont bien différenciées. La différenciation des tumeurs malignes est variable.

Les tumeurs peu différenciées ou indifférenciées sont composées de cellules exprimant peu ou pas de caractère phénotypique particulier. Lorsqu’aucun caractère phénotypique n’est présent, on parle d’"anaplasie" et de "tumeurs anaplasiques".

Cette anaplasie est spécifique des proliférations malignes. Les tumeurs anaplasiques sont fréquemment le siège de grandes variations de la taille et de la forme du noyau (anisocaryose) et du cytoplasme des cellules. Les cellules sont alors dites "pléomorphes".

La dédifférenciation d’une tumeur peut apparaître d’emblée ou être liée à la progression tumorale. La progression tumorale est l’acquisition progressive par le clone tumoral de différents caractères de malignité : fort index mitotique, mitoses anormales, invasivité, anisocaryose, dédifférenciation et anaplasie.

Cette progression est liée à l’accumulation dans le clone tumoral d’une succession d’anomalies génétiques, secondaire à la grande fréquence des divisions cellulaires.

Pour certains cancers comme les cancers épidermoïdes, la notion de différenciation devra être complétée par celle de maturation : quand les cellules d’une tumeur différenciée évoluent vers une maturation naturelle plus ou moins normale (kératinisation pour un carcinome épidermoïde), la tumeur est dite mature ; dans le cas contraire, elle est immature.

Certaines colorations histochimiques peuvent permettre de préciser la différenciation d’une tumeur. Le PAS et le bleu Alcian peuvent montrer la sécrétion de mucoprotéines par les cellules tumorales, objectivant ainsi la nature glandulaire de la prolifération (adénome, adénocarcinome). La coloration de Fontana peut montrer la présence de mélanine, affirmant ainsi la nature mélanocytaire de la tumeur (mélanome). La coloration des graisses neutres (Huile rouge ou Oil-Red-O) peut en affirmer la nature adipocytaire (liposarcome).

La différenciation d’une prolifération tumorale peut également être objectivée par d’autres méthodes que la microscopie optique conventionnelle.

L’immunohistochimie utilise des anticorps marqués (detectables en microscopie optique ou en Fluorescence), dirigés contre un antigène situé à l’intérieur ou à la surface de la cellule tumorale.

De très nombreux types de molécules sont utilisés : la plupart permettent de confirmer la différenciation d’une tumeur, et donc de préciser le phénotype du tissu dont elle est issue.

Par exemple, les immunoglobulines, les molécules du complexe du récepteur T (CD3, CD4, CD8), les molécules présentes à la surface des cellules immunitaires permettent de caractériser les proliférations lymphoïdes.

Les filaments intermédiaires et les filaments contractiles sont des constituants du cytosquelette que l’on peut utiliser comme marqueur de certains types tumoraux. Le tableau II montre quelques exemples de correspondance entre la présence d’une molécule donnée et le type tumoral.

Tableau II : Correspondance entre la présence d’une molécule donnée et le type de tumeur

Molécules Type cellulaire Tumeur Molécules de surface Antigène leucocytaire commun Cellules nucléées sanguines Hémopathies L26, CD20 Lymphocytes B Lymphomes B CD3 Lymphocytes T Lymphomes T Filaments intermédiaires Cytokératine Cellules épithéliales Carcinomes Vimentine Cellules mésenchymateuses Sarcomes Desmine Cellules musculaires striées Rhabdomyosarcomes Neurofilament Cellules neuronales Tumeurs nerveuses Protéine Gliale fibrillaire (GFA) Cellules gliales Gliomes Autres HMB45, Melana Cellules mélanocytaires Mélanomes Chromogranine A Cellules neuroendocrines Tumeurs carcinoïdes C-Kit Cellules stromales Tumeurs stromales Enolase Neuronale Spécifique (NSE) Cellules neuronales Tumeurs nerveuses Neuroblastomes

Toutefois, plus qu’une seule molécule, c’est plutôt l’ensemble des molécules exprimées qui permet l’identification du type cellulaire tumoral.

La microscopie électronique (étude ultrastructurale) permet la mise en évidence d’organites cellulaires spécifiques d’un type cellulaire donné. Le tableau III montre quelle relation peut être faite entre la présence d’un organite cellulaire et un type histologique.

Tableau III: Relations entre la présence d’un élément ultrastructural et un type tumoral

Organite, élément ultrastructural Type tumoral desmosomes, tonofilaments carcinome épidermoïde microvillosités, cils adénocarcinome grains neurosécrétoires carcinome neuroendocrine corps de Weibel-Palade angiosarcome myofilaments rhabdomyosarcome mélanosomes mélanome

8-5- Classification des tumeurs

Depuis la moitié du 19ème siècle, les tumeurs sont classées selon leur localisation et leur aspect morphologique microscopique. La classification nosologique des tumeurs est fondée sur leur caractère bénin ou malin et leur différenciation.

Cette classification s’aide maintenant des techniques d’immunohistochimie, de cytogénétique et de biologie moléculaire tumorale (mise en évidence d’anomalies génétiques spécifiques d’un type tumoral).

Elle s’appuie sur une terminologie précise. Un nom de tumeur se compose d’une racine et d’un suffixe et peut être associé à un adjectif. La racine définit la différenciation (adéno- désigne une tumeur glandulaire, rhabdomyo- une tumeur musculaire striée, léiomyo- une tumeur musculaire lisse, etc...).

Le suffixe "-ome" est utilisé pour nommer les tumeurs bénignes (adénome, rhabdomyome, léiomyome, etc...). Le suffixe "-matose" désigne la présence de tumeurs multiples ou diffuses (angiomatose, léiomyomatose, adénomatose).

Le terme de "carcinome" désigne une tumeur maligne épithéliale (par exemple, adénocarcinome). Le terme de "sarcome" désigne une tumeur maligne conjonctive (par exemple, rhabdomyosarcome). Le suffixe "-blastome" désigne une tumeur embryonnaire (par exemple, neuroblastome ou néphroblastome).

Il existe cependant des exceptions : les lymphomes, les mélanomes sont des tumeurs malignes. Les termes de tératome, de dysembryome, de gliome n’ont pas en eux-mêmes de signification pronostique.

CLASSIFICATION HISTOLOGIQUE DES TUMEURS

TISSU D’ORIGINE BENIGNE MALIGNE

Tissu épithélial Malpighien Papillome, condylome Carcinome épidermoïde Carcinome basocellulaire Transitionnel (urothélium) Papillome Carcinome transitionnel Glandulaire Adénome Adénocarcinome Tissu conjonctif commun Fibrocytaire Fibrome Fibrosarcome Histiocytaire Histiocytofibrome Histiocytome malin fibreux Tissu conjonctif spécialisé Adipeux Lipome Liposarcome Musculaire lisse Léiomyome Léiomyosarcome Musculaire strié Rhabdomyome Rhabdomyosarcome Synovial Synovialosarcome Vasculaire Cartilagineux Osseux Angiome Chondrome Ostéome Angiosarcome Chondrosarcome Ostéosarcome Tissu hématopoïétique Lymphoïde Syndromes lymphoprolifératifs Lymphomes, Maladie de Hodgkin Myéloïde Syndromes myéloprolifératifs Tissu nerveux Méningé Méningiome Nerf périphérique Schwannome (neurinome) Neurofibrome Schwannome malin Tissu de soutien du SNC Astrocytome, gliome Glioblastome Tissu mésothélial Mésothéliome bénin Mésothéliome malin Tissu mélanique Naevus naevocellulaire Mélanome Tissu germinal et embryonnaire Gonies Séminome, dysgerminome

Annexes embryonnaires

- Sac vitellin Tumeur du sac vitellin
- Placenta Môle hydatiforme Choriocarcinome Disque embryonnaire Carcinome embryonnaire Complexes (pluritissulaires) Tératome mature ou bénin Tératome immature ou malin

A différenciation de type embryonnaire Tumeurs du blastème (néphroblastome, neuroblastome)

8-6- Moyens de diagnostic anatomo-pathologique du cancer

8-6-1- Cytodiagnostic

Il repose sur la connaissance des caractères de la cellule cancéreuse.

Plusieurs prélèvements peuvent être utilisés :
- liquides d’épanchement (ascite, pleurésie): le liquide est centrifugé; le culot est étalé sur une lame.
- cytoponction d’un ganglion, d’une tumeur (sein par exemple); le suc aspiré dans l’aiguille peut être étalé sur une lame.
- prélèvement par raclage: col utérin par exemple (frottis cervico-vaginaux)
- apposition sur lame d’une tranche de section d’un organe frais. Cette méthode est très employée pour l’étude des organes hémopoïétiques (ganglions en particulier).

Exemple : Le cytodiagnostic du cancer du col utérin : c’est une méthode simple, sensible (les faux négatifs sont rares, à condition que les frottis soient effectués correctement) et spécifique (les faux positifs sont rares). Enfin c’est une méthode rentable en terme de santé publique car le dépistage systématique du cancer du col par le frottis cervico-vaginal permet la détection de cancers cervicaux. Ce dépistage doit être effectué régulièrement chez les femmes aussi bien avant qu’après la ménopause. Trois frottis sont réalisés : au niveau du cul de sac vaginal postérieur, de l’exocol et de l’endocol. Les préparations sont fixées immédiatement par une laque (alcool isopropylique et glycol de polyéthylène) ou par un mélange alcool-éther. Elles seront colorées par la coloration de Papanicolaou. Seule la biopsie pratiquée lors d’un résultat cytologique signalant ces cellules tumorales malignes permettra de préciser le degré d’extension du cancer (intra-épithélial ou invasif) et sa variété.

8-6-2- Biopsie

La biopsie nécessite certaines précautions :
- éviter de brûler les tissus (bistouri électrique)
- prélever à la limite des tissus sain et tumoral
- éviter les zones de nécrose
- prélever des fragments de taille suffisante
- les fixer ou les transmettre à un anatomo-pathologiste immédiatement.

Une biopsie extemporanée peut être demandée chaque fois que le résultat de cette biopsie peut modifier la technique chirurgicale. Par exemple, devant une tumeur du sein, dont le diagnostic n’est pas fait par l’examen préopératoire, la biopsie extemporanée définira s’il s’agit d’une lésion bénigne (exérèse simple) ou d’une tumeur maligne (exérèse large, mammectomie ou non, avec curage ganglionnaire).

La biopsie exérèse est à double visée diagnostique et curative puisqu’elle consiste à réséquer une petite lésion dans sa totalité. Exemple: biopsie exérèse d’un naevus cutané ou d’un polype intestinal.

8-6-3- Examen macroscopique

L’examen macroscopique des tumeurs est réalisé par le chirurgien, par l’endoscopiste ou par l’anatomo-pathologiste au temps macroscopique de l’examen d’une pièce opératoire.

Cet examen est important. Il permet au chirurgien ou à l’endoscopiste d’avoir une forte présomption sur la nature d’une tumeur ainsi que sur son extension.

Dans un organe creux (vessie, tube digestif, bronches), l’aspect de surface est important. Une tumeur sessile est une tumeur à large base d’implantation. Une tumeur pédiculée est une tumeur possédant une mince base d’implantation ou pied.

Dans le tube digestif, le terme de "polype" est un terme strictement macroscopique désignant une formation en saillie dans la lumière, sessile ou pédiculée, ne préjugeant pas de sa nature histologique (adénome, pseudotumeur inflammatoire, hamartome). Une tumeur villeuse possède un aspect de surface "villeux" (constitué de villosités).

Une tumeur végétante est une tumeur dont la croissance se fait vers l’extérieur (tumeur exophytique). Une tumeur infiltrante est une tumeur dont la croissance se fait, à l’inverse, en profondeur. Une tumeur ulcérée est une tumeur dont la surface est le siège d’une perte de substance.

Au cours de l’examen macroscopique d’une pièce opératoire contenant une tumeur, la pièce opératoire est pesée, mesurée et éventuellement photographiée. Des prélèvements numérotés, identifiant différentes zones, sont faits pour l’examen microscopique conventionnel. Des appositions peuvent être réalisées en apposant la tumeur sur des lames, en particulier en hématopathologie.

Dans certains cas, des prélèvements sont congelés dans l’azote liquide pour l’immunohistochimie ou les études de biologie moléculaire. Un fragment tumoral peut être fixé dans la glutaraldéhyde pour une étude en microscopie électronique. Un autre fragment tumoral peut être placé dans du milieu de culture cellulaire (RPMI, par exemple) pour une étude de cytogénétique tumorale à la recherche d’un remaniement chromosomique spécifique de la tumeur.

8-6-4- Examen microscopique

Les prélèvements déterminent la nature de la tumeur, sa place dans la classification nosologique, son degré de malignité (grade histopronostique) et son extension (stade).

8-6-5- Autres examens

Cette étude peut être complétée par d’autres méthodes.

L’immunohistochimie sur coupes congelées ou sur coupes en paraffine (suivant l’anticorps) permet de mettre en évidence à l’intérieur ou à la surface de la cellule un constituant spécifique d’un type cellulaire donné, et ainsi de préciser la différenciation d’une tumeur.

L’utilisation d’un anticorps reconnaissant une protéine du cycle cellulaire (Ki67, MIB1, PCNA) permet de préciser la proportion de cellules tumorales en cycle cellulaire et ainsi de mieux quantifier la prolifération cellulaire.

Enfin, il est possible de mettre en évidence des proteines virales et ainsi, d’identifier un virus impliqué dans la cancérogenèse ou associé à certaines tumeurs (Papilloma Virus, Virus d’Ebstein Barr, Herpès Virus 8). La microscopie électronique peut permettre de préciser la différenciation d’une tumeur en visualisant des organites spécifiques.

La biologie moléculaire permet de rechercher un remaniement du gène de chaîne lourde d’immunoglobuline ou du récepteur T dans les proliférations lymphoïdes, l’amplification d’un oncogène (comme le gène N-Myc dans les neuroblastomes), des pertes d’allèles ou un remaniement chromosomique spécifique dans une tumeur.

La cytogénétique permet de réaliser un caryotype des cellules tumorales. Il s’agit d’une technique longue (15 jours), coûteuse et d’interprétation difficile. La présence d’une anomalie chromosomique spécifique peut permettre de préciser la nature d’une tumeur.

Pour cela, un fragment frais de tumeur doit être placé dans un milieu de culture cellulaire. L’hybridation in situ de sondes d’ADN fluorescentes sur les chromosomes tumoraux peut permettre de mieux caractériser les remaniements en cause (FISH, Fluorescent In Situ Hybridization).

8-7- Histopronostic des tumeurs malignes

L’Anatomie Pathologique permet d’apprécier le pronostic d’une tumeur. Cette appréciation se fait par l’étude de deux paramètres anatomo-pathologiques : le grade et le stade tumoral.

Le grade histopronostique établit un score en fonction du degré d’anomalies nucléaires et cytoplasmiques, de la différenciation, du nombre de mitoses. Le grade histopronostique tente de quantifier le degré de malignité de la tumeur. Le caractère du stroma, l’existence d’invasions vasculaires, de zones de nécrose, ont également leur importanc.

Ces critères morphologiques sont différents pour chaque type tumoral. Par convention, le grade est noté en chiffres arabes.

Le stade établit un score en fonction de l’extension de la tumeur. Chaque tumeur a son propre système d’évaluation du stade d’extension.

Par convention, le stade est noté en chiffres romains. L’O.M.S. a tenté d’harmoniser ces systèmes en proposant une classification, dite TNM. La classification TNM tient compte de la taille de la tumeur primitive (T), de l’existence éventuelle de métastases ganglionnaires régionales (N) ou de métastases à distance (M). Elle peut être établie sur des données cliniques ou d’imagerie (TNM), ou sur les données de l’examen anatomopathologique postopératoire d’organes ayant fait l’objet d’une exérèse chirurgicale (pTNM; "p" signifiant pathology).

Depuis quelques années, les anatomo-pathologistes proposent des modèles standardisés de comptes-rendus pour les tumeurs les plus fréquentes. Ceci permet d’assurer une description exhaustive de la tumeur en incluant les critères diagnostiques (macroscopie, histologie, immunophénotype) et pronostiques (grade histo-pronostique et stade pTNM).